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Crônicas Cariocas (Chroniques Cariocas)
18 juin 2013

"Ce n'est pas à cause de 20 centimes..."

Si vous ne vivez pas dans une grotte, vous devez avoir sans doute ouï dire que le Brésil est en révolte contre ses gouvernements (je vous rappelle que le Brésil est divisé en Etats, et que chaque Etat a sa propre gestion, le tout, supervisé par le District Federal (et sa capitale, Brasilia), le Gouvernement avec un "G" majuscule) à cause de l'augmentation du tarif des bus un peu partout dans le pays.

Mais...

  • Qu'est-ce-que c'est ?

Cette révolte, qui porte plusieurs noms, entre lesquels "ce n'est pas à cause de 20 centimes..." ou bien la "revolte du vinaigre"*, a commencé lorsqu'en mai, le tarif des bus a augmenté de 20 centimes. J'ai déjà fait un post là-dessus.
L'augmentation a lieue chaque année, généralement en janvier. Sauf que cette année, l'inflation, le badadi-badada de l'économie, du pétrole, de la politique et tout ça, a fait que la Présiente Dilma a demandé aux gouverneurs d'attendre le mois de mai.

  • SAUF QUE...

ce n'est pas à cause de 20 centimes... pendant que le Brésil se prépare aux grands événements sportifs (Coupe du Monde, J.O et Coupe des Confédérations qui a déjà commencé), pendant que le budget du Trésor National passe dans la construction/restauration/amélioration des éléments touristiques et d'accueil sportifs en tous genre (stades, logements...), mais aussi dans les évenements comme les Journées Mondiales de la Jeunesse (évenement catholique) avec l'arrivée du Pape et 3 millions de fidèles, le peuple brésilien est dévoré par une colère noire : ok, ici on aime le sport, les gens sont plutôt cathos, mais pendant que le Brésil se montre au monde, les hopitaux, les écoles/facs, les transports, et surtout les salaires et les retraites, sont laissés de côté.

  • Ce qui a mis le feu aux poudres :

résultat ? Des patients allongés à même le sol dans les hôpitaux par manque de lits, de place, de MEDECINS ; des asiles d'aliénés laissés à l'abandon (avec les malades à l'interieur, s'entend) ; des étudiants qui craignent que leur fac ne ferme par manque de subventions ou par manque d'entretients des locaux (les facs ici sont généralement dans les bâtiments de style coloniaux, magnifiques, mais en ruines car entretenir un patrimoine historique coûte cher) ; une éducation en faillite avec une analphabétisation en croissance totale ; un manque de RESPECT envers les brésiliens au niveau des transports (pratiquement aucune manutention des bus, peu de confort, accidents en tous genres car les limites de vitesse ne sont pas respectées) ; des rues de moins en moins sécurisées car la Police Militaire est occupée à "occuper" les favelas (ou du moins, fait semblant, mais ce n'est que mon humble avis...) ; un blanchiment d'argent, des VOLS incessants par les politiques dans les caisses de l'Etat, et pendant que tout ça arrive, à Rio, le Préfet Eduardo Paes fait refaire le bitume de l'Avenida Atlântica pour la 110ème fois, car c'est la "carte postale de Rio", et qu'il faut montrer une image positive (mais FAUSSE) de la ville au touriste.

  • Réactions :

le brésilien n'est pas content. Et pour la première fois, depuis la Dictature, descend dans la rue et va protester.
Depuis hier (lundi 17 juin), le feu a prit dans la moitié du Brésil, dans les grandes villes : Rio, São Paulo, Brasilia, Belo Horizonte, Salvador, une protestation qui se voulait pacifiste mais qui a vite dégéneré en attaques police/manifestants/casseurs infiltrés. Car vous savez bien, petits français, qu'une manif ça peut vite dégénerer si un groupe de personnes profite du tumulte pour saccager tout ce qui se trouve sur son passage.

  • Au début :

les manifs ont commencé la semaine dernière, par petits groupes accumulés sur Facebook. Puis, manifestation générale prévue le lundi 17 juin. Les organisateurs, se voulant base de paix malgré les protestations, ont suggeré que les participants viennent habillés de blanc, avec les mots "paix", "amour", "volonté de construire un Brésil meilleur, sans violence mais libre et juste", que des fleurs soient distribuées à tous (même aux PMs, dont les visages n'ont pas daigné esquisser un sourire), que les familles viennent avec leurs enfants, bref, que l'ambiance soit pacifiste au possible. 
Tant et si bien, que quand la manif a commencé à Cinelândia hier, vers 17h, les gens étaient assis à même le sol, chantant, riant, dansant, soulevant leurs pancartes de protestation, mais avec l'espoir qu'ils soient entendus sans heurts ni violence. Car ce n'était pas prévu que ça dégénère...

  • Mais...

une manif sans perturbateurs, vous avez déjà vu ça ? Il parrait qu'en Chine ça existe. Et même qu'après ils nettoient leurs rues des papiers, tracts, et salissures en tous genre. Mais nous ne sommes pas en Chine. Et hier ce fut une "prise de la Bastille" version brésilienne. Les parlements des grandes villes ont étés envahis, saccagés, tagués, des mini-feux ont étés allumés, des bombes artisanales lancées, des objets en tous genres lancés contre les PMs (chaises, pierres, noix-de-coco (hey, nous sommes au Brésil tout de même)), des manifestants non-violents ont étés attaqués et frappés...

  • Le jour d'Après :

ce matin, après une nuit de révolte avec 100 mille manifestants et une poignée de casseurs, le Centre de Rio s'est réveillé tagué, brisé, sali. Des manifestants pacifistes se sont fait atteints par les balles de caoutchouc, d'autres (pas toujours pacifistes) par des balles réelles (7 blessés), les Sapeurs Pompiers ont fait de leur mieux pour éteindre les feux allumés, mais l'aide est toujours là.
Le Carioca se veut Flower Power et Peace & Love, mais entendu. Du coup, ce matin, 10h, des étudiants, des professeurs, des travailleurs, ceux qui hier protestaient de façon pacifique, s'acharnaient à enlever les tags imaculant les édifices officiels avec des produits ménagers.

Le vandalisme ne faisait pas partie des plans. Mettre le feu aux poudres et casser et abimer les bâtiments historiques n'était pas prévu. Et revenir sur les lieux des confrontations pour "arranger" le mal perpétré, est une manière d'attaquer, de combattre les violences inutiles mais de continuer à élever sa voix.

  • Dénouement :

ce qui était prévu, c'était faire réagir le Gouvernement. Et apparement dans certains Etats, ça a fonctionné. A Recife et a Porto Alegre, les tarifs vont être revus à la baisse. Et ça, c'est déjà un début.

povonarua_ditadura_20centavos

("Le Peuple s'est réveillé, le Peuple s'est décidé, ou vous arrêtez de voler, ou nous arrêtons le Brésil !")

 

*"la révolte du vinaigre" a été employé pour parler de ces protestations, car lorsque la Police jete des bombes lacrymo, le moyen de réduire les effets, c'est de s'asperger le visage de vinaigre. Apparement pas méga recommandé puisque le combo vinaigre/produits chimiques peut devenir un "= bombe artisanale".

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